La Bible dit-elle la vérité ?

Bien sûr ! Et la vérité est la même dans un texte poétique, romanesque ou historique, dans une lettre, un propos de sagesse, un oracle prophétique ou un évangile…

La vérité est la même : Dieu et sa volonté, les êtres humains et leurs résistances. Or, elle s’exprime différemment suivant les livres. Un psaume joue sur les mots, les sons, le rythme, les images. Les récits mettent en scène les faits et les personnages de manière à faire ressortir le sens. Et le sens concerne le mystère de la relation entre Dieu et son peuple, mystère d’amour et de salut.

Tout l’Ancien Testament, composés sur plusieurs siècles par de multiples écrivains, est « vrai » avec ses légendes, ses rituels liturgiques, ses poèmes, ses cris de douleur ou de confiance, avec ses maladresses aussi (on peut s’ennuyer, on peut se scandaliser). Il est « vrai » parce qu’il construit une espérance, il nous conduit, lentement, vers Jésus, révélation ultime de Dieu.

Tout le Nouveau Testament, composé sur moins d’un siècle, est « vrai » avec son mélange de récits (les quatre évangiles, les Actes des Apôtres), de discours (les lettres de Paul et des autres), son feu d’artifice final (l’Apocalypse). Car il ne cesse de revenir, avec une grande variété littéraire, sur la vérité de Jésus de Nazareth, lui qui est le « Christ » de Dieu, le Messie d’Israël, le sauveur des humains… Un seul texte pouvait-il en rendre compte ? Non.

 

La vérité ne se dit pas d’une seule façon. Petit exemple : relisons Exode 14,21. Qu’est-ce qui est vrai ? La mer refoulée toute la nuit par le vent divin ? Les deux murailles d’eau soudaines ? Cela paraît contradictoire ! Ailleurs, on parle d’un chemin au fond de la mer « dévastée » (Isaïe 51,10) ou bien d’une « plaine verdoyante » (Sagesse 19,8). Pas plus que nous, les écrivains bibliques ne savaient ce qui s’était passé. Mais ils étaient certains que, dans cet événement, Dieu avait sauvé son peuple. C’est à cette conviction de foi qu’ils ont voulu nous faire participer.

Autre exemple : qui a découvert le tombeau vide de Jésus au matin de Pâques ? Une seule femme ? Deux ? Trois ? Plusieurs ? Qui leur a parlé ? Un jeune homme, un ange, deux hommes ? Jésus lui-même ? Les évangiles divergent. Les incohérences ne sont pas des maladresses. Elles sont là pour nous inviter à creuser le sens, à entendre la vérité cachée qui échappe aux mots : Jésus est ressuscité. Comment ? On ne sait. Mais désormais le monde et nos repères ont changé. La vérité n’est pas un acquis, c’est un mouvement qui rend libres !

 

Abbé Gérard Billon, bibliste